lundi 16 décembre 2013

Jimi Hendrix - Mémoire d'Outre-Monde - JC Lattès - 258 pages - 22,90€



Jimi Hendrix Mémoire d'Outre-Monde, Hendrix


Je ne suis pas particulièrement fan de Jimi Hendrix - je connais comme tout le monde "Hey Joe" et "Purple Haze" - mais j'aime les livres autobiographiques dans lesquels les artistes se racontent sans le filtre déformant de la prose journalistique. 

J'aime quand ils s'expriment avec leurs mots à eux, c'est toujours facile à lire, humain, simple, vivant et cela nous permet de ressentir vraiment leurs états d'âme, leur vision de leur métier, du monde qui les entoure, de leurs passions, sans intermédiaires. Et c'est toujours plus intéressant que de lire les potins impossibles à vérifier, les ragots de gens qui ne les ont pas connus mais qui nous expliquent que Jimi Hendrix n'était pas propre - ce qu'on a aussi dit de Marilyn Monroe - et autres considérations du même genre. Je n'aime pas ceux qui se permettent de salir la mémoire des autres pour vendre leurs bouquins. 
Procédé malsain de plus en plus courant malheureusement.

Au moins, les écrits authentiquement personnels permettent d'entrer dans la tête de ces artistes passionnants sans passer par les effets de racolage et on se sent au plus près de leur âme, comme un confident privilégié. J'avais adoré les Fragments (poèmes, écrits intimes, lettres) de Marilyn Monroe, qui m'avaient incité à lire sa Confession inachevée avec le même plaisir (je ferai un post spécial Marilyn prochainement). 

Je me suis donc penchée sur ce livre de Jimi Hendrix (notes, poèmes, journaux personnels, bouts de papier griffonnés) avec une certaine curiosité et je n'ai pas été déçue. On découvre beaucoup d'aspects méconnus du personnage : son humour, sa sensibilité, sa modestie ("je n'ai jamais vraiment été très bon guitariste"), ses galères hallucinantes, son perfectionnisme, son sentiment de grande solitude permanent, son insatisfaction artistique constante (il n'arrive pas à reproduire avec sa guitare ce qu'il entend dans sa tête) et surtout sa pure poésie ! J'ai été complètement scotchée par la traduction de quelques textes de chansons, c'est d'une poésie magnifique, très touchante, alors qu'on n'entend jamais parler de lui pour cet aspect de son œuvre. 

Je ne résiste pas à l'envie de vous en mettre un extrait :

Là, ce portrait souriant de toi
orne toujours mon mur grimaçant,
mais je t'assure que ça ne me dérange, ne me dérange pas tant que ça.
C'est surtout la pluie de poussière incessante qui m'empêche de bien voir
cette boucle d'oreille oubliée gisant à terre,
froidement tournée vers la porte.
Et je continue à brûler la lampe de minuit, tout seul.

J'ai adoré ses mots d'esprit, comme par exemple celui-ci, très drôle et très vrai : "J'ai toujours été très réservé. Un poisson ne s'attire pas d'ennuis s'il garde la bouche fermée".

Il fait souvent preuve de beaucoup d'humour, ce qui rend la lecture très agréable. A propos de Bob Dylan par exemple : « La première fois que j'ai entendu Dylan, je me suis dit : "Ce type est admirable, il faut du cran pour oser chanter aussi faux." Et puis je me suis mis à écouter les paroles. Ça m'a conquis. »

Il s'amuse de sa fameuse réputation de guitariste jouant avec ses dents : "Une fois j'ai eu envie, pour rigoler, de me fourrer des petits bouts de papier dans la bouche avant le concert pour les recracher sur scène comme si je perdais mes dents !".

Sur le rituel de la guitare sacrifiée (brûlée) sur scène : "A Monterey j'ai décidé de brûler ma guitare. Je venais juste de finir de la peindre le jour-même, et je la chérissais. Je l'ai aspergée d'essence à briquet et ensuite, j'ai piétiné les flammes. Ça s'est super bien passé. Alors, à Washington, j'en ai sacrifié une autre. Quand on a fait le Hollywood Bowl, ils nous attendaient avec des extincteurs."

Il porte un regard souvent lucide sur la société qui l'entoure et le fonctionnement du milieu dans lequel il évolue : "C'est pas parce que t'as les cheveux bouclés ou que tu mets des pattes d'eph et des perles que t'es peace and love. Il suffit pas de lancer des fleurs, faut y croire. C'est un feeling, et un type en col blanc amidonné peut très bien l'avoir." Ce jeu des apparences trompeuses est bien d'actualité aujourd'hui.

Enfin, j'ai bien aimé sa critique des médias et notamment de l'attitude opportuniste de la presse américaine à son encontre après qu'il ait triomphé en Angleterre : "Je ne fais rien de bien différent, pourtant voilà qu'on parle de moi dans des magazines comme LIFE et TIME. Ça me fait un drôle d'effet. Ces gratte-papiers sont les mêmes qui se moquaient de moi au début. Ah, ah ! Maintenant, je ne suis plus ce crétin de Jimi, je suis M. Hendrix. Ils tentent de m'analyser et pondent un rapport psychiatrique qui n'a rien à voir avec moi." Toujours très actuel aussi non ? ;)

J'ai découvert à travers la lecture de ce livre un personnage attachant, qui a vécu dans la misère pendant 23 ans et qui ne savoura son succès que pendant les 4 dernières années de sa courte vie.

On découvre aussi que Hendrix était un idéaliste, il pensait sincèrement que la musique pouvait changer le monde, ce genre d'utopie est vraiment propre aux années 60 (et participe grandement à leur charme).

Le livre révèle la pensée du musicien dans l'ordre chronologique de sa vie et non pas par thématique.

Ainsi, on découvre sa première "expérience" dès la page 14 : "Je revois une infirmière en train de me langer et manquer de me piquer avec l'épingle. Je devais être à l'hôpital pour je ne sais quelle maladie parce que je me rappelle que je me sentais patraque. Ensuite elle m'a soulevé du berceau et m'a porté devant la fenêtre, en me montrant quelque chose dans le ciel. 
C'étaient des feux d'artifices, alors on devait être le 4 juillet. Cette infirmière m'émoustillait, défoncé comme je l'étais à la pénicilline qu'elle avait dû m'administrer, et je regardais en l'air et tout le ciel faisait...

S  s  s  c  h  u  u  s  s  s  S  c  h  u  s  h
Mon premier trip !"


Ensuite, on se laisse emporter par son apprentissage de la guitare (en autodidacte), son passage dans l'armée de l'air par le biais de sa correspondance avec sa famille (on y apprend qu'il adore les sauts en parachute), etc. D'ailleurs, il a échappé in extremis au Vietnam : il a été réformé suite à une blessure au cours d'un saut en parachute juste avant le début de la guerre. Malheureusement, le destin ne sera pas toujours aussi clément avec lui par la suite.

Belle découverte donc à offrir aux passionnés de musique ou à vous procurer pour découvrir avec bonheur la forte personnalité de cette légende de la musique.

Le livre donne évidemment envie de se replonger dans l'œuvre de Hendrix, ce que je compte bien faire pendant les vacances :)

2 commentaires:

  1. Il a l'air complet
    Jimi Hendrix pour beaucoup, est une star inaccessible alors que tout nous prouve le contraire.
    C'était un guitariste génial !

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  2. Je note afin de me le procurer merci pour cet article complet

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